Documentaire : Bruit blanc, de Mathilde Monnier et Valérie Urréa - 21h45 - Arte Un magnifique travail centré sur de jeunes adultes frappés d'autisme. Il fallait beaucoup de tact, de simplicité, d'élégance pour succéder à Dominique Bagouet à la tête du Centre Chorégraphique national de Montpellier, pour reprendre le flambeau à la suite du plus remarquable créateur de sa génération, un artiste mort jeune de l'effroyable fléau qui marque cette fin de siècle. Mais la réussite de Mathilde Monnier, sur les plans artistique et humain, se note aussi au travail entrepris par elle et sa compagnie au sein de l'hôpital psychiatrique de la Colombière, à Montpellier, vaste et triste bâtiment gris où s'est mis en place, avec l'association Les murs d'Aurelle, un beau travail centré sur de jeunes adultes frappés d'autisme. Une démarche passionnante, ingrate souvent, source de bonheur aussi, et dont "le but n'est pas de créer une technique de travail, mais plutôt d'accompagner les personnes autistes en les guidant afin qu'elles acquièrent une autre mobilité, d'autres capacités de conscience et de perception, et par là même un éveil à l'autre". Quoi de plus juste, pour des êtres murés dans le silence, que de recourir au langage corporel ? Entre le corps du danseur, souple, heureux, délié, et celui de son partenaire autiste, enserré dans un carcan de souffrances, dans la peur du contact et du changement, mais capable aussi de signes d'une émouvante beauté, s'installe, au prix de longues heures passées en commun, un échange tout plein de tendresse, de complicité muette. La nature de Mathilde Monnier est secrète, peu expansive, ennemie de tout pathos, mais aussi riche et droite. Cela se ressent dans ce film, "Bruit blanc", réalisé par Valérie Urréa, qui ne laisse aucune place au sentimentalisme. Mais qui dit de bien belles choses sur la relation établie entre deux mondes : celui de l'artiste, fascinée sans doute par l'univers des autistes ; celui de Marie-France, jeune fille malade depuis l'enfance, internée en milieu hospitalier, dont on suit les lents progrès, dont on voit le corps et le visage s'ouvrir imperceptiblement vers l'extérieur. Que ressent Marie-France ? C'est un mystère. Mais il est indéniable que tendresse et contact physique lui procurent un sentiment de bien-être, sinon de bonheur.

Raphaël DE GUBERNATIS
Télé Obs
Du 10 au 16 Avril 1999