La saison "officielle" de danse ouvre avec un chef d'ouvre : "Les lieux de là", de Mathilde Monnier Petit rappel d'usage. Depuis quelques années, l'équipe du Festival de danse, dirigée par Jean-Paul Montanari, organise avec les théâtres du district montpelliérain, une programmation de danse, qui court d'octobre à avril. Le Festival étant construit autour de thèmes précis (par exemple "Méditerranée" ou "Jeune danse"), la "saison" est le moyen et l'occasion de proposer des artistes de valeur dont l'ouvre immédiate ne s'inscrit pas dans les thèmes du Festival. Voici le temps de la saison 99/2000, dont le moins que l'on puisse dire est qu'elle est intéressante. Ah, bien sûr, des esprits grincheux regretteront la Pietragala, Bianca Li ou autres Dupont. Mais on peut dire qu'on a droit au très haut de gamme en danse contemporaine. Pensez donc, rien que dans le mois et demi qui court, nous aurons Mathilde Monnier, Boris Charmatz et François Verret. Cerise sur le gâteau, nous pourrons découvrir un groupe de danseurs kenyans en résidence au centre chorégraphique (le 10 novembre à Jean Vilar). La pièce de Mathilde Monnier, directrice du Centre chorégraphique national de Montpellier, faut-il le rappeler, est quelque chose au-delà des ouvres de danse traditionnelles. Les seules comparaisons que l'on puisse trouver se situent dans les domaines du jazz. Imaginez Coltrane (pas moins) réunissant quelques pointures du genre Dolphy autour de son quartet et leur proposant un thème. Et imaginez que vous puissiez voir ça. Eh bien, c'est en gros "Les lieux de là". Depuis plusieurs années, c'est-à-dire depuis son installation à Montpellier, Mathilde Monnier, chorégraphe, a "construit" une équipe de danseurs qui s'est emparée de ses préoccupations scéniques : enfermement, répétition, convulsion, résistance. Il y a un an, elle a lâché la bride, grâce à une musique limpide, celle de Heiner Goebbels, jouée sur scène. Cela a donné une courte pièce, "Les non lieux", magnifique. Autour de cette pièce (une esquisse ?, non, c'est plus que ça !), elle a réuni d'autres danseurs, supplémentaires, dont les noms (Michèle Prélonge, Dimitri Chamblas, Julie Limont, par exemple) font saliver l'amateur. Et leur a proposé un "développement". Un état d'esprit "jazz" de la variation sur un thème imposé qui retrouve une technique baroque : l'art de la fugue en quelque sorte : logique, audace, flamboiement. Le seul challenge de ce mardi soir est de l'ordre de l'occupation de la scène. Celle du Corum est assez fabuleuse pour la danse, mais reste une immensité. La façon dont le "groupe-Monnier" occupera l'espace est la seule inconnue du programme....

Jean-Marc DOUILLARD
La Marseillaise
25 Octobre 1999